Cérémonie de rassemblement d’union républicaine

En cette journée de deuil national, la traditionnelle cérémonie de vœux aux Arrageois a été remplacée par un rassemblement d’union républicaine. Retrouvez ci-dessous mon intervention qui a précédé la lecture du poème « Liberté » de Paul Éluard par Tanguy Vaast, conseiller municipal jeune.

Le 7 janvier 2015 restera gravé dans nos mémoires.

Ensanglantée, cette journée nous a menés sur un chemin d’horreur, de barbarie, de violence…

Ce matin, d’autres évènements sont venus encore noircir le tableau de notre vie, le tableau de notre Démocratie.

Ayons ensemble une pensée pour les 12 victimes d’hier à Charlie Hebdo, à laquelle nous associons la policière municipale décédée ce matin.

  • Jean CABUT, dessinateur et journaliste
  • Philippe HONORÉ, dessinateur
  • Philippe WOLINSKI, dessinateur
  • TIGNOUS, dessinateur
  • Stéphane CHARBONNIER dit « CHARB », dessinateur et directeur de Charlie Hebdo
  • Elsa CAYAT, psychanalyste et chroniqueuse
  • Bernard MARIS, économiste
  • Mustapha OURAD, correcteur
  • Frédéric BOISSEAU, agent d’entretien
  • Franck BRINSOLARO, Brigadier en service
  • Ahmed MARABET, policier dans le 11ème arrondissement
  • Michel RENAUD, Fondateur du festival « Rendez-vous du Carnet de voyage »
  • La policière municipale de Montrouge

Je vous propose de respecter ensemble une minute de silence.

Je suis fier d’être français !

Je suis fier de toute cette mobilisation spontanée qui a fait mouvement hier pour rassembler, dans un esprit républicain, tous les citoyens qui voulaient témoigner leur douleur. Ces 12 victimes, 13 depuis ce matin, nous marquent.

Qui voulaient témoigner leur solidarité : la France est en peine, les familles sont en peine.

Qui voulaient affirmer un NON. Non ! Nous refusons cette violence, nous refusons cette haine, nous refusons de laisser  s’installer ce climat en France.

Je suis fier d’être un citoyen du monde !

Si la France a été touchée, c’est le monde entier qui a été marqué par cette barbarie.

La circulation de l’information par les réseaux sociaux notamment accélère aujourd’hui le partage des évènements.

Le monde entier a réagi pour témoigner son soutien, sa solidarité, l’horreur qu’il ressentait en visualisant et en comprenant ce que nous vivions.

On dit souvent que notre société est individualiste… Quelle belle preuve encore de générosité, quelle belle preuve d’humanité, quelle belle preuve d’attention à l’autre portée depuis ces dernières 32 heures.

Preuve s’il en était que la solidarité n’a pas de frontières, que les différences s’effacent quand l’essentiel est en cause. Au contraire, ces différences peuvent se muter en force au service de l’humanité ; nous en avons encore une preuve.

Je suis fier d’être arrageois !

Hier, tout au long de l’après-midi, les questionnements, les initiatives, les gestes fusaient pour apporter sa contribution à ce besoin profond d’être debout ensemble, et de démontrer, s’il en était besoin, que notre ville ouvrait son cœur à toutes les personnes traversées par ces actes de folie.

Je suis fier d’avoir vécu hier ce moment de recueillement entre citoyens, citoyens de toutes origines, citoyens de tous horizons, citoyens de toutes croyances et de toutes sensibilités qui ont témoigné ensemble leur attachement aux valeurs de la République :

Liberté, Egalité, Fraternité.

La Liberté, c’est bien elle qui est ciblée.
La Liberté, c’est elle que nous défendons encore et encore.
Les valeurs de notre Démocratie ne se négocient pas.
Les valeurs des Droits de l’Homme ne se discutent pas.
Elles sont le ciment de la communauté française, elles sont aussi le ciment de notre communauté citoyenne arrageoise.
Et je suis fier, ce soir, que vous soyez si nombreux à vous être déplacés pour partager ce moment de recueillement.
Je suis fier que nous soyons si nombreux ce soir pour rappeler, o combien, il est primordial de faire bloc, de se rassembler, de défendre et d’affirmer le vivre-ensemble.

J’ai eu un échange hier avec un certain nombre de responsables de communautés religieuses. Ce matin un autre avec Monseigneur Jaeger. Je sais qu’ils prendront une initiative pour œuvrer ensemble au dialogue et à la paix.

Je vous salue et je vous remercie tous encore de votre présence.

Vous avez trouvé ou vous trouverez dans le hall de l’Hôtel de ville des livres qui vous permettront d’exprimer une émotion, de déposer un message à l’attention des victimes de ces dernières heures.

Je voudrais terminer ce moment par le poème de Paul ÉLUARD, le bien nommé LIBERTÉ, qui sera lu par Tanguy VAAST, conseiller municipal jeune.

Vous pourrez ensuite prendre le temps que vous voulez pour échanger, pour discuter. Le Beffroi vous est ouvert, il est votre maison.

Ce soir, la France est debout, le monde est debout, le Beffroi d’Arras est debout et le restera !

Ce soir, nous sommes tous des Charlies ! 

—–

Liberté

Sur mes cahiers d’écolier
Sur mon pupitre et les arbres
Sur le sable sur la neige
J’écris ton nom

Sur toutes les pages lues
Sur toutes les pages blanches
Pierre sang papier ou cendre
J’écris ton nom

Sur les images dorées
Sur les armes des guerriers
Sur la couronne des rois
J’écris ton nom

Sur la jungle et le désert
Sur les nids sur les genêts
Sur l’écho de mon enfance
J’écris ton nom

Sur les merveilles des nuits
Sur le pain blanc des journées
Sur les saisons fiancées
J’écris ton nom

Sur tous mes chiffons d’azur
Sur l’étang soleil moisi
Sur le lac lune vivante
J’écris ton nom

Sur les champs sur l’horizon
Sur les ailes des oiseaux
Et sur le moulin des ombres
J’écris ton nom

Sur chaque bouffée d’aurore
Sur la mer sur les bateaux
Sur la montagne démente
J’écris ton nom

Sur la mousse des nuages
Sur les sueurs de l’orage
Sur la pluie épaisse et fade
J’écris ton nom

Sur les formes scintillantes
Sur les cloches des couleurs
Sur la vérité physique
J’écris ton nom

Sur les sentiers éveillés
Sur les routes déployées
Sur les places qui débordent
J’écris ton nom

Sur la lampe qui s’allume
Sur la lampe qui s’éteint
Sur mes maisons réunies
J’écris ton nom

Sur le fruit coupé en deux
Du miroir et de ma chambre
Sur mon lit coquille vide
J’écris ton nom

Sur mon chien gourmand et tendre
Sur ses oreilles dressées
Sur sa patte maladroite
J’écris ton nom

Sur le tremplin de ma porte
Sur les objets familiers
Sur le flot du feu béni
J’écris ton nom

Sur toute chair accordée
Sur le front de mes amis
Sur chaque main qui se tend
J’écris ton nom

Sur la vitre des surprises
Sur les lèvres attentives
Bien au-dessus du silence
J’écris ton nom

Sur mes refuges détruits
Sur mes phares écroulés
Sur les murs de mon ennui
J’écris ton nom

Sur l’absence sans désir
Sur la solitude nue
Sur les marches de la mort
J’écris ton nom

Sur la santé revenue
Sur le risque disparu
Sur l’espoir sans souvenir
J’écris ton nom

Et par le pouvoir d’un mot
Je recommence ma vie
Je suis né pour te connaître
Pour te nommer

Liberté.

Paul Eluard, Au rendez-vous allemand, 1945, Les Editions de Minuit

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